«J’ai pris plaisir à me confronter à lui. Mais il est temps qu’il s’en aille», a déclaré Balthasar Glättli, conseiller national Verts fraîchement élu dans le canton de Zurich, à propos de Christoph Blocher. Il y a quatre ans, les commentateurs politiques des quatre coins du pays répétaient déjà que l’heure du tribun de l’UDC était venue. À l’époque, le 12 décembre 2007, les représentants du peuple avaient infligé à cet habitué du succès la défaite la plus retentissante de toute sa carrière. Même il y a huit ans, lorsque celui qui s’était alors autoproclamé leader de l’opposition avait fait son entrée au gouvernement fédéral, ses adversaires avaient cru l’avoir mis au placard du Conseil fédéral et donc l’avoir neutralisé.

Christoph Blocher rendrait service à lui-même comme à son parti s’il envisageait les quatre prochaines années réellement comme un tour d’honneur et une forme d’adieu conciliante.

À chaque fois, les observateurs se sont trompés. Blocher ne s’est pas fait «dresser» au gouvernement. Il a su se relever, même après le K.-O. de décembre 2007. Il est à présent de retour dans la Berne fédérale, reprend place sous la coupole du Palais fédéral et va de nouveau chercher désespérément (et trouver) les mots qui fâchent à la tribune. Qu’il le fasse dans la petite ou la grande chambre n’a pas d’importance. Le principal est qu’il retrouve les bancs du Parlement.

Christoph Blocher Blocher semble être le seul à n’avoir pas encore remarqué qu’il est temps qu’il s’en aille.

En temps normal, ce retour ne marquerait que la conclusion, sous forme de conciliation, d’une grande carrière politique. Un acte symbolique en somme. En football, on parle de match d’adieu; on pourrait aussi, comme en athlétisme, parler de tour d’honneur. La star du football français Zinedine Zidane a connu une fin de carrière professionnelle assez mouvementée: carton rouge et exclusion du terrain après un comportement inacceptable lors de la finale de la Coupe du monde 2006 contre l’Italie à Berlin. Qui voudrait en rester sur une telle humiliation? Le match d’adieu, disputé contre une sélection mondiale de stars du football, lui a donné l’occasion de se réhabiliter.

Pour Balthasar Glättli, Blocher est le seul à n’avoir pas encore remarqué qu’il est temps qu’il s’en aille. Cet homme politique de la nouvelle génération, celle d’après Blocher, a peut-être raison. Mais de fait, le ponte de l’UDC ne fait pas l’effet de quelqu’un qui est prêt à faire son tour d’honneur. Bien au contraire : il s’affirme une fois encore comme le chef d’orchestre d’une lutte unie contre l’UE et contre les étrangers. Nombreux sont ses jeunes partisans à répéter à qui veut l’entendre que Blocher se trouve à nouveau au meilleur de sa forme.

Ce n’est pas le seul dirigeant dans son cas, à refuser de raccrocher à 70 ans bien sonnés. Bien souvent, cela n’est pas très beau à voir. Il n’y a qu’à regarder, par exemple, un peu vers le sud, chez notre voisin. Christoph Blocher rendrait service à lui-même comme à son parti s’il envisageait les quatre prochaines années réellement comme un tour d’honneur et une forme d’adieu conciliante. Dans le football, les anciennes stars servent de joker en fin de carrière. Au bout d’un certain temps, elles deviennent entraîneurs de jeunes.

Christoph Blocher pourrait ainsi devenir le Heinz Herrmann de la politique: au terme de sa carrière professionnelle, ce détenteur de records internationaux a trouvé sa vocation dans la formation des jeunes. Il transmet ainsi sa très riche expérience à la nouvelle génération. Blocher pourrait montrer qu’il a compris les signes en se retirant de la course au Conseil des États, dans laquelle il n’a absolument aucune chance, et cela au profit de forces plus vives. Et pourquoi pas de Natalie Rickli, qui a si brillamment remporté son élection?